La seconde conférence de la série Deloitte Digital tenue ce mercredi 25 mai était consacrée à l'un des sujets les plus brûlants du moment: la technologie blockchain, son potentiel de rupture et les attentes qu'elle suscite.
La conférence a débuté par une présentation par Patrick Laurent, Partner et Technology Leader chez Deloitte Luxembourg, du rapport Deloitte Tech Trends 2016: Innovating in the digital era qui identifie les huit tendances pouvant impacter les entreprises d'ici 18 à 24 mois. Patrick Laurent a successivement abordé la Right-Speed IT (ou comment transformer les systèmes d'information en termes de modèle opérationnel), l'arrivée à maturité des technologies de réalité virtuelle et augmentée, désormais susceptibles d'être exploitées pour refondre les processus métiers, l'exploitation de l'IoT dans la création de valeur, à travers la gestion des données, l’exploitation des infrastructures IoT existantes et le développement de nouveaux modèles économiques, l'obligation de moderniser les systèmes au cœur des métiers pour alimenter la croissance stratégique et la nécessité d'une intégration plus forte de ces applications avec des systèmes externes ainsi que d'une flexibilité plus importante pour répondre aux évolutions des processus et produits.
Patrick Laurent a encore évoqué les plateformes autonomes, des architectures où les composants sont massivement virtualisés et gérés par des outils de supervision et d’optimisation de dernière génération, poussant l’IT vers un modèle ITaaS d'offreur de services autogéré et sans limites de capacité, de performance ou d’échelle. Le Technology Leader de Deloitte Luxembourg a souligné l'importance d'adopter de nouveaux modèles d’organisation et des méthodes de développement innovantes pour industrialiser l'analytique de données et transformer les gisements de données en information stratégique. Il a relevé que l'impact social de l'expansion technologique prend de plus en plus de place dans les réflexions stratégiques des entreprises et que l’évolution des technologies telles que l’intelligence artificielle, la robotique, l’impression 3D, l’Internet des Objets ou la biologie synthétique va nécessairement questionner le modèle social, voire même créer une fracture entre ceux qui auront adopté ces technologies et les autres. Pour conclure, il a consacré le dernier point de son intervention à la technologie blockchain qui pourrait fournir une alternative crédible à l’infrastructure procédurale, organisationnelle et technologique indispensable au maintien de la confiance à l’échelle institutionnelle, et dont le Luxembourg pourrait devenir l'un des leaders à condition de s'y atteler dès maintenant.
Un laboratoire blockchain pour les services financiers de la région EMEA
Patrick Laurent en outre a annoncé que, dans le cadre de son initiative FinTech The Grid, Deloitte avait décidé de créer un laboratoire blockchain destiné aux services financiers de la zone EMEA (Europe, Moyen-Orient et Afrique). "Ce laboratoire sera coordonné depuis Dublin et impliquera des équipes spécialisées de toute l'Europe, dont l'équipe de développement blockchain de Deloitte Luxembourg", a-t-il expliqué. Le laboratoire blockchain de Deloitte, qui représente un investissement de plusieurs millions €, sera composé de 50 spécialistes et sera progressivement mis en place au cours de ces 18 prochains mois. Patrick Laurent est d'ores et déjà membre du steering committee du Grid Blockchain Lab (voir aussi Deloitte announces multi-million investment in blockchain lab).
Au cœur de blockchain
Eric Piscini, Principal & Deloitte Cryptocurrency Center Lead auprès de Deloitte US, s'est ensuite attaché à décrypter l'impact sur les activités économiques de la technologie blockchain, "qui est à la valeur ce que l'internet est à l'information", en supprimant les intermédiaires entre cette valeur et ses bénéficiaires. Parmi les applications susceptibles de bénéficier de la nature distribuée, inaltérable et pair à pair des transactions reposant sur une plateforme basée sur la technologie blockchain, Eric Piscini a mis en avant la tenue de registres automatisée, à faible coût et au niveau de fidélité élevé, l'opportunité d'effectuer des transferts de valeurs sécurisés, quasiment en temps réel et sans intermédiaire, et la possibilité de transformer radicalement, grâce aux smart contracts, la manière dont les contrats sont exécutés.
"De grandes entreprises, des sociétés de capital-risque et des acteurs publics investissent aujourd'hui activement dans la technologie blockchain", a noté Eric Piscini. Plus d'1 milliard de dollars ont ainsi été investi, notamment par des consortiums trans-sectoriels (Hyperledger project, R3), dans le but de créer des méthodes standard d'implémentation. Selon une étude de Santander InnoVentures, les scénarios les plus susceptibles de se concrétiser dans l'industrie de la finance relèvent des payements transfrontaliers, de la gestion d'actifs, des crédits syndiqués, des processus KYC, des opérations sur titres, et du financement des échanges commerciaux. Le Luxembourg a quant à lui une carte à jouer dans le domaine de la gestion et la distribution de fonds, "puisque nous avons tous les ingrédients nécessaires", comme l'a rappelé Laurent Marochini, co-président du groupe de pilotage Blockchain de l'ALFI, pendant la table ronde qui a clos la conférence.
La séance d'information s'est poursuivie par la présentation, par Eric Benz, co-fondateur et COO de Credits, d'un projet de KYC fédéré basé sur blockchain et réalisé par la start-up pour les autorités de l'île de Man. Credits est un fournisseur d'infrastructures blockchain qui propose une solution PaaS (Platform-as-a-Service) et une gamme d'outils destinés à construire des architectures blockchain sécurisées et évolutives.
ArtTracktive, le POC blockchain de Deloitte Luxembourg
Sebastien Genco, Senior Manager chez Deloitte Luxembourg, a pour sa part révélé les résultats d'une étude menée conjointement par Deloitte, l'Efma et KBC Securities, et consacrée à la position des institutions financières face à l'irruption de la technologie blockchain dans leurs secteurs d'activité, tandis que Jean Dos Santos, Senior Manager auprès de Deloitte Luxembourg, présentait le projet pilote ArtTracktive, une alternative blockchain à la procédure papier qui trace habituellement la provenance et les mouvements d'une œuvre d'art. L'équipe de développement blockchain de Deloitte avait initialement dévoilé l'application lors de l'édition 2016 du sommet technologique ICT Spring Europe, le 10 mai dernier à Luxembourg. La conférence s'est close sur une table ronde réunissant Laurent Marochini, Eric Piscini et Eric Benz, et animée par Sebastien Genco.
La prochaine conférence du cycle Deloitte Digital, consacrée à l'industrialisation de l'analytique de données, aura lieu le 12 octobre prochain.
Michaël Renotte